Region Afrique
Country Afrique du Sud
novembre 27, 2017
Translated by Dico
Reuben Sandile Oupa Mbambisa, un récupérateur de matériaux, âgé de 52 ans et membre actif du Comité des récupérateurs de Johannesburg, fut brutalement assassiné à l’aube du 12 septembre 2017 dans la rue où il a élu domicile. On croit que son meurtre résulte d’une altercation qui s’est produite le 10 septembre quand il est intervenu dans une bagarre entre un homme et sa petite amie.
Reuben est né et a grandi dans le canton de Kagiso, au sud de Johannesburg. Il a travaillé dans plusieurs entreprises, dont la compagnie ferroviaire sud-africaine Spoornet. Après avoir perdu son dernier emploi dans le secteur formel, il s’est tourné vers le recyclage informel et a déménagé dans la ville en 1988. Il a vécu et travaillé dans les rues de Fietas, un secteur en marge d’une banlieue à prédominance indienne, situé à l’ouest du quartier central des affaires de Johannesburg.
Un leader actif, toujours prêt au service des autres
En juin 2017, Reuben s’est vu élu par les récupérateurs de Fietas pour les représenter au Comité intérimaire des récupérateurs de Joburg. Ce comité a été établi par les récupérateurs dans le but de répondre collectivement à la décision de Pikitup, une société d’État, le fournisseur officiel de services de gestion des déchets de la ville de Johannesburg, d’externaliser aux entreprises privées les services de triage à la source des déchets recyclables. Menacés de chômage du jour au lendemain, dès l’entrée en vigueur des nouveaux contrats de tri à la source, et ce le 1er juillet 2017, les récupérateurs ont protesté en organisant une campagne, ponctuée par des manifestations publiques et des interventions dans les médias, pour attirer l’attention sur leur lutte.
Reuben était parmi les leaders de la marche historique des récupérateurs le 13 juillet 2017 à Johannesburg. Toujours prêt à mener les autres et à se mettre à leur service, il s’est porté contrôleur bénévole des premiers secours le jour de la manifestation et s’est montré l’un des fervents opposants au programme de séparation à la source qui menaçait les moyens de subsistance des récupérateurs de matériaux. Dans un manifeste paru en juillet 2017, Reuben a écrit :
« Au nom de tous lesabagerezi, nous disons que nous ne sommes vraiment pas contents que la municipalité veuille nous priver de notre pain, sans parler de quoi payer le loyer et envoyer nos enfants à l’école. […] Tout ce que la municipalité pense faire est d’enlever notre dernier espoir de survie. »
Suite à la marche historique, les récupérateurs de Johannesburg ont vu les choses progresser : le directeur général de Pikitup a mis un terme à la signature de nouveaux contrats avec des entreprises privées, a reconnu les récupérateurs comme des acteurs clés dans le secteur de récupération de la ville et a accepté de les rencontrer. Une semaine après la marche, désigné parmi les porte-parole devant les responsables municipaux, Reuben, en cohérence avec son manifeste de juillet 2017, a fait état des conditions de vie et de travail difficiles des récupérateurs :
« La vie est très difficile pour nousabagerezi . Certains pensent que nous sommes paresseux et tout cela, ce qui est loin d’être le cas. Nous parcourons toute Jozi sans être sûrs si nous allons recueillir assez de quoi recycler. […] Certains <abagarezi sont des sans-abri alors qu’il y a des terres inutilisées. […] Certains recycleurs parmi nous sont analphabètes, d’autres n’ont jamais mis pied dans les locaux de l’école. »
Malgré les défis, Reuben était convaincu que le recyclage informel était une manière digne de gagner sa vie et devrait être reconnu et soutenu par la ville de Johannesburg :
« La collecte de conteneurs à boisson froide, de plastiques, de canettes, de boîtes en carton et de ferraille est tout ce que nous faisons pour nous assurer des moyens de subsistance. […] Le recyclage est notre source de revenus. Le recyclage nous tient éloignés de la drogue. Le recyclage nous tient éloignés du crime. […] Le recyclage est le moyen le plus simple de gagner sa vie, surtout ici à Gauteng par rapport à d’autres provinces. »
Un organisateur des récupérateurs de matériaux qui a compris que le pouvoir que revêt l’union
Reuben était parmi les travailleurs qui ont pris la décision de former l’Union des récupérateurs africains, donnant aux récupérateurs de Johannesburg une voix collective dans leur lutte pour se faire reconnaître en tant que travailleurs offrant un précieux service public et environnemental. Le 9 septembre, il a participé à la réunion du Comité des récupérateurs pour discuter de la participation de sa communauté à une campagne de nettoyage, prévue le 13 septembre, dans le secteur où il est domicilié. Malheureusement, c’était sa dernière et le dernier jour que ses camarades le verraient vivant. Bien qu’il soit mort beaucoup trop tôt, sa mémoire et son leadership exemplaire perdurent.
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